La complainte des Ombres: "premier tome savoureux"
Comme d’habitude, les éditions l’Alchimiste nous propose un roman d’une belle qualité. Premier tome d’un diptyque de Florian Paret, Le maître horloger est une fantasy étonnante – d’ailleurs plus proche du fantastique que de la pure fantasy – dans un monde où certains manient le temps à leur guise et où d’autres cousent des Ombres à qui le demande.
Si le début est un peu long à se mettre en place (il faut attendre une soixantaine de pages pour voir l’intrigue décoller), l’intrigue de Paret est tellement prenante que la lecture se fait très facilement. Le concept du roman est original, mais c’est surtout l’ambiance qui est particulièrement bien menée, entre boutique d’horlogerie, cimetière et grotte obscure où se cachent d’étranges créatures.
On peut regretter que la géographie du monde soit un peu laissée de côté : parfois, on n’a plus l’impression d’être dans un monde fantastique, et ce, malgré la belle carte en introduction. La façon de parler des personnages est souvent trop moderne et la présence de la magie est un peu trop laissée de côté pendant toute la première moitié du roman. Cependant, le gros travail sur les personnages qui sont tous forts sympathiques (le héros Elvin, le gitan Gaspard, le couturier des ombres Gabriel) rend le roman vraiment agréable. Les dialogues sont bien menés et on saluera l’évolution des personnages qui, au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue, évoluent vraiment : se posent des questions, changent de point de vue, réfléchissent à leur condition, proposent des solutions… Ainsi, leurs côtés très humains permettent de s’y attacher facilement.
Le maître horloger est un premier tome savoureux, bien écrit et bien mené. Les réflexions de l’auteur autour du temps qui passe et du pouvoir des souvenirs donnent toute son originalité au projet. À travers le divertissement que la lecture procure, le roman nous permet de nous interroger sur notre rapport au temps, entre nostalgie du passé et anticipation anxieuse du futur : l’auteur dit en sous-texte l’importance du temps présent !
Au vu du dernier chapitre, la suite du roman va sans doute permettre d’en découvrir plus sur l’origine des capacités de la famille Rivière, de découvrir si l’immortalité est possible, mais surtout comment Elvin en est arrivé à détourner les principes fondateurs des maîtres horlogers, le rendant ainsi prisonnier du temps et de ses souvenirs…